« Je lui disais que je le détestais de me faire souffrir et que tout était de sa faute »

Par où commencer ? Généralement, je mets du temps à coucher mes premiers mots sur le papier, mais une fois que je suis lancée, il est difficile de m’arrêter. Aujourd’hui, j’ai décidé de te partager une expérience personnelle, en partie inconfortable, mais très riche et qui m’a permis d’évoluer considérablement. Peut-être te parlera-t-elle ? Peut-être pas.

Il y a maintenant environ onze ans que ma première histoire d’amour s’est terminée de façon assez chaotique. Une belle histoire d’amour, mais aussi une histoire de possession. Cela fait seize ans maintenant que j’ai rencontré mon tout premier amour…Seize ans avant que l’envie me prenne de poser des mots sur cette histoire. Il m’a peut-être fallut autant de temps parce qu’après avoir compris des choses à propos de cette expérience révélatrice sur moi-même et mon histoire, il me fallait aussi oublier (volontairement) cette dernière pour me protéger ; puis m’en rappeler à nouveau après avoir expérimenté d’autres expériences similaires tout aussi inconfortables, pour ensuite les accueillir, les digérer réellement, accepter ce que je pouvais et ce que je ne pourrai jamais changer. Il s’agit d’un processus tout à fait naturel, plus où moins long selon qui nous sommes, qui m’a permis d’évoluer considérablement et de sortir définitivement de ces expériences négatives. En réalité, cela prend en effet quelques années de se libérer de certains de ses conditionnements!

Seize ans aussi parce qu’une part de moi avait honte des comportements irrationnels que j’ai pu avoir et dont je devais faire le deuil. Il m’a fallut aussi du temps pour me rendre compte que tout n’était pas de ma faute et qu’il était nécessaire que je me pardonne pour avancer et ne pas commettre à nouveaux les mêmes erreurs et ne pas retomber dans les mêmes schémas toxiques. Vaste, complexe et périlleuse entreprise que de s’épanouir pleinement. On dit souvent (je ne sais pas qui est ce « on » d’ailleurs) que l’on ne reste souvent pas avec son premier grand amour. Je vous le confirme, pour moi en tout cas. Peut-être parce que cet amour est la première grande expérience pour grandir et apprendre sur soi-même?

Je crois (je ne suis pas du tout au point avec les dates pour tout dans ma vie !) que j’avais 16 ou 17 ans lorsque j’ai rencontré ce beau brun aux yeux bleux-verts, au regard ténébreux. Guitariste dans un groupe de néo-metal de surcroit ; franchement les nanas, j’avais tiré le gros lot et j’en ai fait des jalouses à l’époque ! Non seulement il était beau, gentil, intelligent, mais en plus c’était un musicien… « la classe à Dallas », dixit mon amie Vanessa. En fait, je l’admirais ce garçon. Je l’admirais parce qu’il renvoyait et possédait tout ce que je n’avais pas ou que je ne pensais pas avoir. Il faisait de la musique avec une aisance et une prestance incroyable, il faisait une école de commerce prestigieuse, il avait une famille très à l’écoute de ses besoins et présente pour lui, et il avait un frère et une sœur magnifiques avec lesquels il entretenait une très belle relation.

A cette époque, j’étais une grande adolescente blessée, fille unique d’un couple divorcé. Je vivais avec ma maman qui s’était remariée et qui a eu rapidement un autre enfant, mon adorable petit frère qui me martyrisait. Oui, bon, je fais ma marseillaise là, mais je me souviens qu’il me tirait tout le temps les cheveux, il me faisait mal et je le laissais faire (il était trop chou), jusqu’à ce que mes parents s’en rendent compte et me disent que cela n’était pas normal.

A dire vrai, je n’ai jamais vraiment trouvé ma place durant mon enfance. J’avais un père business man, brillant et ambitieux dont la carrière était une priorité pour lui. Il n’était pas très présent, du moins pas comme je l’aurais souhaité en tant qu’enfant. Mais je n’en veux à personne, ni à ma mère, ni à mon père parce qu’ils ont fait ce qu’ils ont pu avec leurs propres éducations et leurs propres ressources intérieures. Je vous passe les détails de mon enfance ici, mais tout ce que je peux vous dire, pour replacer le contexte, c’est que je me suis longtemps cherchée car je n’ai pas vécu énormément d’expériences lorsque j’étais enfant. J’étais une gamine plutôt obéissante et soumise, je ne disais pas vraiment ce que je pensais, je subissais, je me sentais seule et j’étais très anxieuse. Je ne me souviens d’ailleurs pas de toute mon enfance, j’ai des « blackout », qui s’explique aisément en psychologie. Mais cela n’est pas mon propos ici. J’ai été beaucoup rejetée par les autres enfants et, derrière mon sourire d’ange et de première de la classe, j’étais assez malheureuse pour tout vous dire.

A mes 16 ou 17 ans (allez, on va dire 16 ans et demi pour couper la poire en deux !), il y a donc eu cette bouffée d’oxygène, cette lumière qui est apparue dans mon obscurité, ce jeune homme rayonnant est entré dans ma vie pour me faire vivre des moments merveilleux. J’ai découvert les plaisirs de la sexualité, la tendresse, l’attention, la musique, le sentiment de liberté de profiter pleinement de la vie et d’être véritablement aimée pour ce que j’étais (et franchement, chiante comme j’étais, il devait vraiment m’aimer! Ha Ha !).

Il me semble qu’une des dernières choses qu’il m’a dit lorsque nous nous sommes quittés (de ce dont je me souviens), c’est : « nous ne nous sommes pas rencontrés au bon moment ». Aujourd’hui, cette phrase qui n’avait absolument aucun sens pour moi à l’époque, résonne au plus profond de mon être. Ce jeune homme était juste le premier ange gardien qui m’a été envoyé pour m’aider à avancer sur mon chemin. Je ne crois pas trop aux créatures célestes, mais je crois fermement aux anges gardiens terrestres, à ceux qui croisent notre chemin, ou bien, qui restent à nos côtés toute notre vie et ont un impact considérable sur celle-ci. Il fut l’un d’entre eux, celui qui ne faisait que croiser ma route pour me montrer la direction à prendre sur le chemin de ma vie.

A cette époque, en 2004 (ça y est, je commence à retrouver la temporalité exacte), je finissais mon année de terminale (punaise, que j’ai vieilli…) et je débutais un BTS en Management des unités commerciales en alternance. Je bossais pour une famille de siciliens, plus spécifiquement pour un homme, le genre de petit patron avec un égo surdimensionné et dont le besoin de reconnaissance qu’il cherchait à travers le regard de son papa (le big boss) était immense (et destructeur). J’ai vécu un enfer. Là encore, je vous passe les détails car il y aurait trop de choses à raconter.

Les années 2004 à 2006 furent donc un véritable calvaire pour moi. Au point d’ailleurs, que mon prince charmant, qui était plutôt de nature discrète, fut obligé d’intervenir sur mon lieu de travail afin de remettre quelques uns des égos à leur place. Mon protecteur. Le protecteur de la petite fille perdue, blessée qui n’était absolument pas capable de dire par elle-même ce qui n’allait pas. J’étais amoureuse éperdument de cet homme (pas du sicilien hein, du rockeur!) mais j’en attendais beaucoup trop de lui. Je l’admirais alors que je me détestais. J’étais complexée par mon corps, je ne supportais pas mon image se refléter dans le miroir. Je portais des vêtements larges pour ne pas que l’on devine mes formes et je cachais souvent mon visage avec ma longue et brillante chevelure châtain claire. Je ne faisais rien sans lui, je vivais et j’existais uniquement à travers son regard. Dès que je faisais quelque chose, j’avais besoin de son approbation.

C’est d’ailleurs à ce moment là que j’ai commencé « timidement » la musique, mais j’avais peur de la critique, peur du regard de l’autre et zéro confiance en moi. Je lui envoyais toujours des messages pour savoir où il était et ce qu’il faisait. J’avais constamment besoin d’être avec lui, de sentir sa présence. J’étais possessive et je ne supportais pas qu’une femme ne s’approche trop de lui. Nous sommes restés ensemble cinq années, pendant de grandes étapes de ma vie de jeune femme, notamment celle où j’ai eu mon baccalauréat, puis mon BTS, et lorsque je suis partie vivre à Paris pour commencer mes études d’histoire de l’Art et d’archéologie à la Sorbonne. Nous y avons d’ailleurs vécu ensemble, et c’est là-bas que nous nous sommes quittés.

La magie de l’amour n’était plus au rendez-vous depuis quelque temps avant même que nous nous séparions. Je ne ressentais plus aucun désir pour lui, je le dévalorisais même, et je n’arrivais pas à l’assumer. Mon corps m’envoyait pourtant des messages, tout ce que mon mental essayait habilement de bloquer, j’avais mal au ventre et d’autres problèmes féminins que je n’ai plus jamais eu après que nous nous sommes quittés… Je faisais en sorte que cela marche, j’essayais de me forcer, mais il n’y a rien à faire, l’amour s’était envolé, il n’y avait que de l’attachement, de la routine et des habitudes.

Finalement, nous n’étions rien d’autre que des meilleurs amis parce que ce désir, cette flamme intense, ce truc qui vous donne des petits papillons dans tout le corps était parti depuis un moment déjà. Je n’avais pas spécialement envie de raviver la flamme en allant voir ailleurs ou en faisant une thérapie de couple. Nous étions trop jeunes, j’étais trop inconsciente et je fuyais complètement ma réalité. Le jour où j’ai appris qu’il fréquentait quelqu’un d’autre, mon monde s’est écroulé. J’ai tout fait pour le retenir. Mais à quoi bon vouloir le récupérer alors que je ne ressentais plus aucun désir pour lui ? En réalité, je voulais seulement le posséder. Ma petite fille intérieure était blessée, je me suis mise dans des états complètement irrationnels. J’ai crié, j’ai pleuré et je me suis fait du mal. J’ai essayé de « recoller » les morceaux mais plus rien n’avait aucun sens dans ma réalité. C’était ma petite fille intérieure qui était terrorisée à l’idée d’être abandonnée… Elle a tout tenté pour lui montrer qu’elle existait, la méchanceté, la séduction, absolument tout pour essayer de le retenir. Mais je refusais catégoriquement de le laisser partir. Je lui disais que je l’aimais alors que je ne l’aimais plus en réalité, je me mentais à moi-même. Je n’acceptais seulement pas de laisser partir un morceau de moi. Je ne supportais pas l’idée que j’allais me retrouver seule, en difficulté.

Je n’avais pas, dans cet état, les ressources intérieures pour retrouver un appartement à Paris et refaire complètement ma vie. Je n’étais pas seule pourtant, j’étais très bien entourée par des amis formidables qui me tendaient leurs bras grands ouverts, mais je ne saisissais pas cette chance. C’est comme si je ne voyais plus rien, plus aucun positif, seulement l’obscurité et le début d’un long tunnel dont je ne voyais pas la sortie. En fait, j’allais retrouver cet état de tristesse que j’avais vécu lorsque j’étais enfant, cette insupportable solitude dévastatrice à laquelle je ne voulais plus faire face. Je fuyais. Je lui disais que je le détestais de me faire souffrir et que tout était de sa faute. J’étais même prête à le pardonner de partager le lit d’une autre femme. En réalité, je ne l’aurais jamais pardonné. J’étais dans une incapacité totale d’accueillir et de faire face à mes émotions parce que j’avais passé ma vie à les feindre pour ne pas avoir à les gérer. J’étais une jeune femme hypersensible, vulnérable mais remplie de colère depuis des années. J’étais le genre de personne à laquelle il ne fallait surtout pas se frotter. J’étais la petite fille qui devait être parfaite, conditionnée à être parmi les meilleurs et à ne surtout pas exister.

Cette colère, ces comportements destructeurs étaient avant tout des mécanismes de défense qui me permettait de me protéger de moi avant de me protéger des autres. Je ne savais même pas pourquoi je ressentais cette colère, d’ailleurs, je ne la ressentais pas en réalité, elle transparaissait dans mes comportements et mes actions parfois violentes. Mais pour moi c’était normal, c’était mon   « fort caractère ». Je ne l’ai pas compris tout de suite, il m’a bien fallut quelques années pour me remettre en question et me rendre compte que je devais me donner moi-même cet amour dont j’avais besoin, et ne pas l’attendre de l’homme qui partageait ma vie.

J’ai compris surtout que je devais avoir confiance en moi. Ce travail, je pourrai vous en parler ailleurs, peut-être dans un livre. Qui sait ? Après des années de travail sur moi-même, j’ai compris que pour pouvoir aimer véritablement un autre homme sans attente, il me fallait me libérer de mes chaînes, être moi-même et exister d’abord pour moi-même et non plus à travers le regard de l’autre. Ce n’était pas l’autre que je devais admirer, c’était moi. Etre fière de la jeune femme que je regardais dans le miroir. Trouver ma voie et me trouver seule, déterminer quels étaient mes talents et ainsi, de savoir qui j’étais sans l’autre. Pour cela, il m’a fallut des années de recherches et d’expérimentations ici et ailleurs pour le toucher du doigt.

Après cette histoire d’amour, j’ai rencontré ce qu’on appelle communément chez les femmes, un « tourneur de page ». Cette relation a quand même duré trois ans, avec des hauts et des bas. C’était un homme pas très bien dans ses pompes, mais d’une gentillesse incroyable. J’aurais aimé que nous restions amis, mais la vie en a décidé autrement. Je vous passe les détails de cette relation, mais là encore, j’ai eu de sacrées bonnes leçons. C’est d’ailleurs pendant cette relation que j’ai commencé à partir en Inde et où j’ai vécu de grandes expériences. C’est à ce moment là où j’ai vraiment fait la démarche de recherche de moi-même, même si une partie de moi tentait de fuir ma réalité. C’est là-bas que j’ai commencé à apprendre, à me reconnecter à moi-même et ouvrir grand les yeux sur le monde et sur moi. Comme le confirme le célèbre proverbe : « le voyage, le meilleur moyen de se perdre pour se retrouver ».

Et puis un jour, en 2011, alors que mon groupe de rock cherchait à recruter un nouveau batteur, un magnifique et pétillant jeune homme est rentré dans la salle pour venir auditionner. C’était une lumière qui rayonnait. Son regard brillant exprimait plein de choses et il me faisait mourir de rire. Adorable, intelligent, sensible et bourré de talents, c’est lui qui a fait à nouveau battre mon cœur dans tous les sens du terme (sans jeu de mots ! Ha ha !). Chose qui n’était pas arrivée depuis bien longtemps.

En huit ans de relation, ma petite fille intérieure a quelque fois montré le bout de son nez…et vous savez à quel moment ? Au moment où il m’a fallut me retrouver seule. C’était une période inconfortable pendant laquelle je ne supportais plus l’isolement dans ma campagne et d’être loin de toutes les personnes que j’aime profondément. J’étais en pleine reconversion professionnelle, dans l’insécurité la plus totale, je ne lâchais pas prise. J’étais complètement déstabilisée et la solitude me pesait. Ma petite fille intérieure était à nouveau présente. Je me rendais compte que tout n’était pas réglé. A ce moment là, j’ai laissé un autre homme me séduire. En fait, cela faisait du bien à ma petite fille intérieure de sentir que j’intéressais quelqu’un, qui me faisait me sentir moins seule. Pour tout vous dire, c’est tout à fait le genre d’homme qui ne m’intéresse pas. Un garçon, sans intérêt pour quoi que ce soit, profondément malheureux et prêt à tromper sa propre compagne. Mais j’éprouvais ce besoin (in)explicable de sentir que j’existais à travers les yeux de quelqu’un. Parce que je me sentais seule. Résurgence de cette petite fille abandonnée, impatiente, dépendante et blessée. Je n’en suis pas fière, mais rassurez-vous cette histoire n’est pas allée bien loin, heureusement. J’ai toutefois compris une chose, c’est que je ne me suffisais pas encore à moi-même et que je devais prendre un temps pour me retrouver pour faire le point sur mes envies, sur ce dont j’avais besoin et que je devais m’apporter. Mais j’ai compris aussi que j’aimais profondément et sincèrement l’homme qui partage ma vie et que j’étais absolument incapable de m’offrir à quelqu’un d’autre.

Si j’ai sombré doucement, j’ai coulé très profondément même, j’ai pu aller toucher de près des émotions que je refoulais encore depuis bien longtemps. Il m’a fallut comprendre pour quelles raisons ces émotions étaient présentes, les accueillir et les gérer au mieux. Et cette fois-ci, ce n’était pas de la colère, c’était autre chose. Mais avec mes expériences précédentes, mes solides ressources et tout le travail que j’avais déjà fait sur moi-même, j’ai rapidement revu la lumière. Là encore, cela m’a rappelé que je devais absolument être épanouie par moi-même sans attendre quoi que ce soit de la personne que j’aime. Mais cela m’a également permis de revoir quelles sont mes valeurs de vie, ce qu’est pour moi l’amour, comment je le définis, ce qui est possible pour moi et ce qui ne l’est pas. C’est riche de ces expériences que je sors encore grandie, plus libre, plus sûre de moi et plus amoureuse que jamais, de moi, mais également de lui.

J’espère que ces mots résonneront pour vous, n’hésitez pas à m’écrire et à me partager votre expérience. N’hésitez pas non plus à partager mon article pour faire connaître mon blog. 

Je vous embrasse chaleureusement.

Alexandra

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